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INTRODUCTION |
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Les
deux formes verbales INCANTARE / ENCHANTER ont la même étymologie,
le latin impérial "incantare" " chanter des
formules magiques ", de in-, préfixe marquant l'aboutissement
d'une action , et de cantare, dérivé de canere,
chanter . INCANTARE et ENCHANTER gardent encore aujourd'hui des nombreuses
acceptions communes ; néanmoins, dans des contextes particuliers,
leurs participes passées incantato / enchanté
n'ont plus la même signification. |
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En
français "enchanté", participe passé
du verbe transitif ENCHANTER, dans l'usage courant peut signifier "très
heureux","ravi", lorsqu'il est employé dans les formules
de politesse ; sa traduction italienne sera alors : " piacere",
"molto lieto". |
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En
italien "incantato", participe passé de INCANTARSI
intransitif pronominal, signifie :
·— rapporté à une personne "rapito, trasognato,
attonito", et se dit de quelqu'un qui est dans la condition de "
restare fisso, immobile" : la traduction française est alors
"bouche bée","ahuri", "dans
la lune" ,
·— rapporté à un mécanisme " inceppato","
bloccato"", et se dit de quelque chose dont le mouvement s'est
arrêté : la traduction française sera "enrayé",
"bloqué".
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Dans
certaines acceptions INCANTARSI se traduit par donc par "tomber en
extase, rêvasser" pour les personnes, "se bloquer, s'enrayer"
pour les choses, alors que S'ENCHANTER encore chez Proust signifie "tirer
une rare satisfaction, une sorte de plaisir enivrant de quelqu'un ou de
quelque chose". |
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Dans
le latin INCANTARE est exprimé une idée de chant qui va magiquement
soumettre à son pouvoir, séduire et saisir dans l'immobilité
ceux qui l'écoutent . C'est le chant d'Orphée et des Sirènes
qui, par sa beauté, dépossède ceux qui l'entendent
de leur volonté, et les saisit, les pétrifie de plaisir.
Notre proposition est que dans l'acception courante de la formule de politesse
"enchanté", le français ait opéré
une saisie anticipée du sens qui ne sélectionne que l'idée
du plaisir existante dans le sens global du verbe- sur celui que nous allons
appeler "l'axe de la séduction"-, alors que l'italien
dans "incantato" interrompt le mouvement de semantogenèse
pour se fixer dans l'idée d'arrêt du mouvement -sur celui que
nous allons appeler "l'axe du saisissement".
Ces deux idées, celle de séduction et celle du saisissement,
étant contemplées dans la signification plénière
du verbe, qui comprenait au départ un 'idée originaire de
"chant magique" , non retenue dans ces acceptions modernes
-l'axe du "magique" .
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Nous
allons procéder ici à une étude diachronique des différentes
acceptions des verbes ENCHANTER et INCANTARE dans leurs premières
apparitions (en notant quelques persistances significatives de ces acceptions
dans l'usage des deux langues, avec des exemples tirés des œuvres
littéraires ). Nous allons montrer comment se feront les saisies
sur l'axe de la signification plénière du verbe, qui progressivement,
par subduction de l'idée de " chant " et de "magique"
, en viendront, dans des contextes donnés, à définir
plutôt des acceptions où va primer l'idée de "
séduction", ou de "saisissement". |
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HISTORIQUE
DE "ENCHANTER"
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I.AXE
DU MAGIQUE |
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1.soumettre
à un pouvoir magique |
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ENCHANTER
est un emprunt, adapté d'après chanter (1121-1134), au latin
impérial incantare.
Vers1100 apparaît pour la première fois le substantif masculin
"encanteûr" (Chanson de Roland),
mais la première attestation littéraire du verbe ENCHANTER
en français remonte au 1121-1134, chez PHILIPPE DE THAON, Bestiaire,
éd. L.Walberg , 1621. ( Le Trésor de la Langue Française,
publié sous la direction de Paul IMBS aux éditions du CNRS,1977).
À cette époque ENCHANTER s'exprime dans sa signification plénière
de "soumettre à un pouvoir magique ", faire une
incantation ou ensorceler ; l 'enchant au XIIème siècle est
un enchantement ou un sortilège, l'enchanterie ou l'enchantison un
charme ou un sortilège.
On enchante quelqu'un ou quelque chose au moyen d'une formule, d'un rite,
d'un filtre.
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Le
Littré cite comme premières attestations d'ENCHANTER , au
XIIème s.
" Ancor est-il ceanz, ce cuit [je pense]
, Ou nous sommes tous enchanté tuit (tous) ", le Chevalier
au lyon, v.1127.
" Tant les ad enchantez qu'od
sei les fist aler, A la neuf sont venu, e entrerent en mer ", Th.
Le Mart, 133.
Et au XIII ème s. :
" Moult i convient grant garde por nos
ames salver ; Diables nous est près , qui nous veut enchanter
", Chans. D'Ant. I, 97.
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Dans
ces utilisations ENCHANTER désigne donc l'action par la quelle des
hommes ou des choses sont soumis à une action surnaturelle ; le français
moderne peut garder cette plénitude du sens " magique ".
C' est dans cette acception que Anatole FRANCE écrit en 1908 :
" La fée Viviane enchanta
l'enchanteur et le retint charmé dans un buisson d'aubépine
", J.d'Arc, t.1, p. 201.
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Et
c'est sur cet axe du "magique" que nous sommes lorsque
nous parlons de "château enchanté", "bois enchanté",
ou de "Flûte enchantée", le titre de l'Opéra
de Mozart qui en italien est justement traduit par " Flauto magico",
en ce que il a reçu un enchantement, et par conséquent
est douée de pouvoir magique. |
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ENCHANTER
reste donc par excellence le verbe qui désigne le chant qui charme,
qui ensorcelle. A cet égard cet extrait est exemplaire :
" Comme la voix des sirènes enchantait
les compagnons d'Ulysse, de même je me sentais enchanté
: Valérie me semblait être sur le rivage… " KRÜDENER,
Valérie, 1803, p. 152
Nous trouvons dans ce texte du XIXème la forme verbale utilisée
d'abord dans sa signification plénière, et ensuite saisie
dans une acception plus moderne, mais où à la notion de plaisir
se mêle encore quelque chose de l'ordre de l'imaginaire, du rêve.
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Au
XVI ème s. le participes passé d'ENCHANTER "enchanté"
était souvent associé à "charmé",
et même si la saisie du sens se faisait dans la métaphore,
principalement dans le champs sémantique lié à l'Amour,
l'acception reste est plus proche de "ensorcelé" que de
"ravi" : pour l'homme du Moyen Age et de la Renaissance être
enchanté et charmé reste une épreuve,
un' expérience proche de la perte de la possession sa volonté
et de ses capacité par l'effet d'un pouvoir irrésistible.
" Tellement enchanté et
charmé du poison d'amour, qu'il ne pensoit à autre
chose qu'à elle ", J. AYMOT (1513-1593) , Anton. 46
Nous remarquons que c'est l'amour qui opère l'enchantement, et non
pas la femme, dont " le chant " passe sous silence.
Ronsard écrit en 1578:
" Je me faux [me trompe] : l'amour qu'on
charme est de peu de séjour.
Etre beau, jeune, riche, éloquent, agréable,
Non les vers enchantés, sont les sorciers d' Amour."
Sonnets pour Hélène, XXIV
Les " vers " sont " enchantés " car ils
détiennent le pouvoir de séduction (et le reste de pouvoir
magique) du chant poétique, et par cela, ils enchantent.
Mais si le poète dans sa clairvoyance comprend que l'enchantement
amoureux à l'avenir sera saisi plutôt dans la séduction
du paraître que du côté du chant , il n'en reste pas
mois que le charme de ses vers est, lui, immortel.
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2.soumettre
à un charme irrésistible et inexplicable |
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Dès
la fin du XIIème s., vers 1190, chez GARNIER DE PONT-SAINTE-MAXENCE,
auteur d'une Vie Saint Thomas le Martyr de Cantorbire (1175 ca.), ENCHANTER
se dit pour "soumettre à un charme irrésistible et
inexplicable". Cette acception se situe toujours sur l'axe du "magique",
mais elle s'en éloigne, comme elle s'éloigne du chant pour
ne garder que l'idée de l'envoûtement. ENCHANTER va prendre
de lors les acceptions de "captiver, conquérir, envoûter,
subjuguer", que nous retrouvons dans ces utilisations postérieures:
"
[…] les traîtres appas dont je fus enchanté ".
MOLIÈRE, Don Garcie, II, 5.
"
Enchanté, tourmenté et comme possédé par le
démon de mon cœur. "
CHATEAUBRIAND, René
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II.AXE
DE LA SEDUCTION |
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1)
du chant à la parole : "persuader" |
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A
la fin du XIII ème s. le LITTRÉ cite Le Roman de
la rose, de GUILLAUME DE LORRIS ET JEAN DE MEUNG,
" Si croi que m'avez enchantée,
Male leçon m'avez chantée ", la Rose, 13895.
Dans cette acception
où le contexte est celui du magique, et nous retrouvons le "chant
", déjà dans le sens d'une parole persuasive et séduisante
; mais c'est au XV ème s. que ENCHANTER perd davantage de
son "aura magique", pour prendre le sens d'acte de "séduction"
que l'on opère sur quelqu'un au moyen de ce qui reste du chant,
les paroles :
"
[ Les Flamands venaient de faire alliance avec le Roi d'Angleterre contre
le roi de France, celui-ci leur manda] que, si ils se vouloient
reconnoistre et retourner à lui, et relenquir ce roi d'Angleterre
qui enchantés les avoit, il leur pardonnerait ", FROISS. I.
I,106.
Ici le complément désigne une collectivité, sur de
laquelle on a exercé comme une emprise magique. Le résultat
est toujours que l'objet de l'enchantement perd le sens de sa personnalité
ou le sens de sa volonté, mais cela se fait au moyen de promesses,
et non plus d'un chant magique. Il est intéressant de remarquer
que le roi de France cherche à briser ce " enchantement "
de paroles, par sa propre parole, pour que les Flamands reviennent à
eux (" se… reconnoistre "), et à lui.
C'est de cette façon d'agir sur les hommes par une action comparée
à un enchantement que parle BOSSUET :
"
Les faux prophètes les enchantent par les promesses d'un règne
imaginaire " Boss. Hist. II, 7.
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2) remplir
quelqu'un de vif plaisir |
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En
1228, dans Guillaume de Dole de J.RENART , au participe passé
"enchanté " signifie être " sous le charme "
mais ici de la joie et du bonheur, et présente donc une acception
déjà en partie dégagée de l'idée de magie,
et plutôt liée à une notion de plaisir : Le Grand
Larousse de la langue française rattache à cette première
apparition du début du XIIIèmè tous les sens de "extrêmement
heureux, ravi", jusqu'aux formules de politesses par lesquelles on
exprime sa satisfaction. C'est donc d'ici que partirait l'axe de la "séduction",
qui amène jusqu'aux significations de " charmé, content,
enthousiasmé, heureux, satisfait ".
Mais c'est véritablement à partir du XVIIème
( av.1648) que ENCHANTER est attesté pour la première fois
dans un emploi que le dictionnaires définissent comme affaibli, avec
la signification de "remplir quelqu'un de vif plaisir",(cf.
ravir) "Le Robert, Dictionnaire historique de la langue française.
Sur l'axe de la" séduction ", déjà éloigné
de l'idée de "magique ", l'usage de la langue va opérer
donc une saisie supplémentaire, et sélectionner une idée
de plaisir dégagée de l'aspect de " persuasion par la
parole" ou d' "état amoureux".
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Dans
cette acception MOLIERE écrit :
" Vos paroles…vos regards…votre
action et votre ajustement ont je ne sais quel air de qualité qui
enchante le gens "Le bourgeois gentilhomme
.
Et c'est ce " je ne sais " qui justifie peut être l'emploi
du verbe ENCHANTER, qui est ici en charge de dire l'indicible, de définir
l'insaisissable, de mettre en mot le reste de magie inexplicable d'un attrait.
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ENCHANTER
va être très employé XVIIème au et XIXème
siècles, dans ses acceptions de "causer un vif plaisir à
quelqu'un", "satisfaire au plus haut point" ;
le secrétaire de Diderot écrit par exemple :
" Une conversation ingénieuse
avec un homme est un unisson ; avec une femme, c'est une harmonie, un concert.
Vous sortez satisfait de l'une ; vous sortez
de l'autre enchanté ".
J.JOUBERT, Pensées, VIII, LXVIII.
C'est donc de cet
axe que viendront les acceptions modernes, où enchanté s'emploie
avec une valeur de " très heureux ", " ravi".
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Plus
rare, en emploi pronominal S'ENCHANTER va être utilisé dans
le sens de"tirer une rare satisfaction, une sorte de plaisir enivrant
de quelqu'un ou de quelque chose".
"
Pour moi, c'est lire sans comprendre que de s'enchanter aux cadences
et aux sonorités d'un texte sans égard à la signification
des mots ",
(AYMÉ, Confort, 1949, p.37).
"
M. de Charlus s'enchantait à raconter des mots involontairement
typiques ", (PROUST, Temps retrouvé, 1922, p .766)
;
Ce dernier exemple
est important car il nous renvoie à la difficulté de traduire
en italien le " s'enchantait " de Proust , car M. de Charlus
n'est ni "bouche bée" ni "bloqué" ,
et cela en raison du fait que le français ENCHANTER fait la saisie
du sens sur l'axe du plaisir, et non pas sur celui du saisissement.
En effet, si nous
avons pu dégager ces deux axes, celui du "magique"
et celui de la "séduction", pour repérer
en français un axe du "saisissement" nous sommes
amenés à déplacer la recherche du verbe ENCHANTER
au verbe CHARMER.
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III.AXE
DU "SAISISSEMENT" ( DANS "CHARMER.") |
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CHARMER
est le verbe dérivé de "charme", le carmen
latin, le chant magique. Il fait son apparition au XIIème s.,
en 1150, avec la signification de "soumettre à opération
magique"( Thèbes, 8880 dans T.-L.). |
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Au
XVIème s., en 1550, le participe présent adjectif charmant
apparaît chez Ronsard avec la signification de "qui a le pouvoir
magique de charmer " (RONSARD, Odes, 75) . |
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Vers
1560 CHARMER signifie déjà "faire céder à
un pouvoir attrayant"," fasciner " : le sens est donc est
saisi dans l'acception plus moderne de" plaire", "
séduire". D'après le Larousse-Dictionnaire
historique de la langue française d'Alain RAY, " avec un
complément abstrait ", (tel les maux, l'ennui, la faim), CHARMER
prend la signification de " apaiser, calmer" ( 1560,
charmer l'ennui des ans )… ". |
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Nous
constatons que dans ces acceptions la signification donnée revoie
aux idées de"paix", de "calme",
et que CHARMER signifie ici " suspendre l'effet
d'un sentiment triste et pénible "(LITTRÉ). Malgré
le fait que les significations données soient parfois "adoucir",
"rendre agréable ce qui est désagréable
", et que ces termes puissent être rapportés au chant
sémantique du plaisir, nous pensons que ces acceptions ne seraient
pas à faire partir de l'axe de la séduction. Notre proposition
est plutôt que l'on fasse partir ces acceptions sur un nouvel axe
, celui du "saisissement". |
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Il
y aurait à ce moment un nouvel axe qui se départirait du fond
commun d' ENCHANTER ET CHAMER , et qui prendrait en charge l'idée
du " saisissement" , d'un mouvement, ( du cours de la nature,
des maux, de l'ennui , de la faim , du danger des serpents, etc.). |
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En
effet, Le Dictionnaire Universel d'Antoine FURETIÈRE, éditée
à La Haye, et à Rotterdam, chez Arnout & Reinier Leers
en 1690 , propose :
" ENCHANTER. v. act. User de magie, d'art diabolique,
pour opérer quelque merveille qui arrête le cours de la nature
.
Les Chevaliers errants étoient souvent
enchantez dans les Roman fabuleux. Les Sirènes enchantoient
par leurs chants. Ce mot vient de incantare,
qu'on a dit pour le simple cantare, dont les Anciens se sont servis
pour parler des charmes des Magiciens. "(Axe du
"magique" , avec une idée de "saisissement ",
perdue depuis.).
" ENCHANTER, se dit figurément en Morale,
de ceux qui se servent de paroles douces ou artificieuses pour plaire à
quelqu'un, ou pour en tirer avantage, ou pour
se faire admirer.
Cet Orateur nous enchanta par les belles
choses qu'il nous dit. Cette femme a des beautés qui enchantent
tout le monde. Cette musique est si belle,
qu'elle enchante." ( Axe de la "séduction").
" CHARMER. v. act. Faire quelque chose de merveilleux
par la puissance des charmes ou du Démon. On tient que les Sorciers
charment les armes , les empêchent de
tirer ; mais il n'est pas trop sûr de s'y fier. L'Ordonnance des Eaux
& Forêts deffend de charmer les
arbres, c'est à dire, de les faire mourir malicieusement "(Axe
du " saisissement ").
" CHARMER signifie aussi , Dire ou faire quelque
chose de merveilleux, de surprenant, plaire extraordinairement. Cet homme
charme par l'agrément de sa
conversation, cette femme charme tout le monde par sa beauté,
par sa modestie, les tableaux de ce palais, la beauté
de cette promenade, m'ont souvent charmé. Ce mot vient du
Latin carminare, ou carminibus incantare. " (Axe
de la "séduction ", avec
un intéressant distinguo de la séduction au masculin, par
les attraits de la parole, et au féminin par les attraits physiques).
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CHARMER
en français a donc été utilisé, dans des contextes
particuliers, avec la signification de "arrêter, bloquer",
jusqu'à "faire mourir", dans
une saisie qui sélectionne l'idée d'un mouvement, d'une action
, d'une nuisance ou d'une existence saisies, empêchés, arrêtées
, bloquées, anéanties. Mais cet usage s'est perdu, à
la différence de ce qui est arrivé en Italien, où il
est possible de dire de nos jours, avec D'ANNUNZIO
qui fut le premier à l'écrire : "il fucile si é
incantato". |
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Pour
résumer l'évolution du participe passé "enchanté",
nous avons vu comment depuis sa première attestation avec la signification
de " sous le charme " (1228) en
parlant de personnes, il a conservé le sens étymologique de
"magique" (av 1648), et de "frappé par un sortilège"(1661),
lorsque il est utilisé dans son acception plénière.
Il a été remplacé par "enchanteur" lorsqu'il
est appliqué à ce qui produit
un effet inexplicable et irrésistible (1669), pour rentrer aujourd'hui
dans l'usage courant dans le formules de politesse, avec la signification
de "très heureux". |
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Nous
signalons néanmoins que dans son manuel de savoir-vivre , Le bonheur
de séduire L'art de réussir aux Éditions Fixot,
Paris 1992, la baronne Nadine de ROTHSCHILD écrit
" En aucun cas , une jeune fille, et
encore moins une femme , répondra à un homme : "Enchantée,
Monsieur" ".
L'enchantement étant peut être
admis exclusivement dans une parole au masculin, car l'Enchanteresse, c'est
toujours et seulement la Femme ? La raison
de l'interdit n'est pas à chercher dans cette unique explication
, car la baronne poursuit :
" Un homme suivra la même règle
et ne dira que "Mes hommages, Madame" (les hommages étant
réservés aux femmes mariées) ou "Mes
respects, Mademoiselle"."Enchanté" est donc
à bannir des présentations. "
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Sans
doute que dans " enchanté " la charge de séduction
sulfureuse est encore sensible, son passé lourd du chant des Sirènes,
des magies de Circée, si l'attentive baronne nous met à l'abri
, hommes et femmes, de l'emploi d'un mot si dangereux. |
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HISTORIQUE
DE "INCANTARE"
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I.AXE
DU MAGIQUE |
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Le
verbe italien INCANTARE dans sa forme transitive est attesté à
partir des siècles XIIIème-XIVème dans sa signification
"recitare formule magiche o compiere atti che producano effetti
soprannaturali ", proche du sens latin , qui comme nous avons vu
renvoie à un "chant magique".
Au XIIIèmè siècle sont attestés "encantamento"
chez le poète Uguccione da Todi, "incantamento" chez l'écrivain
florentin G.Giamboni (1235-1295 ca),"incantatore" est " chi
opera incantesimi ", nei Fioretti di Vite e nelle Rime
di Dante,"incantato" avant 1332 chez Maestro Alberto est utilisé
dans l'acception de "dotato di poteri magici";
Bocaccio utilise INCANTARE dans l'acception de " fare incantesimi,
sortilegi o fatture" :
" Vanno ad incantare con una orazione,
e il picchiare rimane ".
BOCCACCIO, Decameron, 7-1(151).
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Au
XIVème siècle sont attestés pour la première
fois : "incantagione","incantatura","incantazione","incantante","incantadore","incantato","incantesimo",
"incantatoire", toujours à ramène sur l'axe du "magique",
sur le quel nous retrouvons au siècle XVIIIème s. "incantatorio"
et au siècle XXème s. "incantadora".
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INCANTATO
sur cet "axe du magique" va prendre des acceptions liées
au surnaturel :
Sottoposto a influssi o pratiche magiche ; privato per per opera magica
della coscienza o della volontà ; stregato, fatturato :
" Poi che alcuni giorni si sforzo' smenticarsi
costei,e conobbe non esser a lui possibile levarsela di mente…d'estrema
malinconia perdette il cibo e il sonno, di modo che pareva persona incantata
", BANDELLO, 2-58(II-239).
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Legato
da un incantesimo, da un sortilegio (di un luogo) ; sorto per magia e sede
di portenti, di immagini illusorie ; popolato di presenze misteriose
.
-Nous rencontrons ici un véritable "topos"du roman
chevalerèsque et des contes, celui du "chateâu enchanté",
"il castello incantato", qui avec "la foresta incantata"
n'a pas finir de hanter l'imaginaire de tout homme, et tout enfant, en Occident.
Dans la langue italienne ces lieux enchantés sont perçus comme
étant à la fois magiques, et "figés" : c'est
le château de la Belle au bois dormant, par exemple . Les exemples
sont très nombreux :
" A voler il ver dirti, / questa mi par
stanza di spirti: / questo palagio, Orlando, fia incantato, / come far si
soleva anticamente. PULCI, 2-27-28
"
Fermarsi al fin di seguitar l'impresa, / e trarre Ruggier de l'incantato
loco ", ARIOSTO, 2-65.
" l 'uomo intanto, cavalier fatato,
/ in groppa del suo giovane pensier, / nel castel di fantasime incantato
/ cerca indarno il perduto passegger ",PASCOLI, 1218.
Dotato di poteri soprannaturali, o di virtu' magiche ; magico, fatato
; portentoso. In particolare : reso invulnerabile o straordinariamente
potente per opera magica.
" O Circe, la tua man così 'ncantata
/ è troppo lieve , che le membra umane / solo di mutare è
potenziata ", MAESTRO ALBERTO, 148.
" Furono due albergatrici, che, dando
agli uomini certo cacio incantato, gli facevano divenire
someri ", BOCCACCIO, Dec. 7-9 ( 251).
" Poi comincio' in battaglia andare
armata / come Camilla o la Pentessilea; / e la sua armadura era incantata,
/ che nessun ferro tagliar ne potea ",PULCI, 15-109.
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INCANTATO
peut avoir dans ces acceptions la signification de "straordinariamente
forte", donc à l' opposé du sens de " bloccato,
annientato" qu'il peut assumer sur l'axe du saisissement. Par exemple,
pour rester avec Pulci , dans:
" Avevan già combattuto insino
a nona / Rinaldo a quel diavolo incantato ", PULCI, 5-50.
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Nous
constatons ici que c'est toujours le contexte qui permet de comprendre quelle
significations est exprimée prioritairement par le mot. |
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Sur
cet axe du "magique", dans le sens de "conferire virtu' o
poteri soprannaturali", sottoporre una persona o un oggetto a pratiche
magiche", serait à faire remonter la signification de
Trarre auspici, predizioni, attesté à partir du XIVème
siècle :
" Andando Nattambo fuori della terra
lungo i fossi mostrandogli il corso delle stelle, disse Alexandro : "deh,
guarda maestro, che morte tu devi fare". Ed elli, incantata
alcuna stella, sospirando rispuose : "dicioti che moio figliuolo
mi farà morire". PUCCI, II-82
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II.AXE
DE LA" SEDUCTION " |
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L'italien
opère des nombreuses saisie anticipées sur l' axe de la "séduction",
mais il ne développe pas un verbe "parallèle" comme
c'est le cas dans le français "CHARMER",
Ces saisies semblent moins importantes et moins récourrentes que
dans la langue française, qui elle privilegie nettement cet axe et
paraît s'épanouir plus richement que l'italien dans cette diréction.
D'après des études récentes, " les particolari
accezioni che INCANTARE assume nel Settecento (" mi hanno incantato",
"resto incantato" e simili) sono influenzate dal francese CHARMER
" cfr. M.L. ATIERI-BIAGI, Studi sulla lingua della commedia toscana
del primo Settecento, in " Atti e Memorie dell'Accademia Toscana
di Scienze e Lettere "La Colomaria" (1965),pp. 251-378 .
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L'INCANTO
est déjà un " sommo piacere " pour Cecco
d'Ascoli, avant 1327,
" Perchè si sdegna tanto / la
mente umana, se congiunge amore / sua donna col piacer di nuovo incanto
? ".
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INCANTO
est " una cosa o persona deliziosa " en 1586 chez C. Lanci ; le
verbe INCANTARE est attesté dans le sens de "affascinare, ammaliare"
avant 1500, chez le poète Serafino Aquilano (1466-1500), l' INCANTARICE
est " colei che affascina, seduce " dans l'acception que nous
retrouvons chez Torquato Tasso (avant 1595), et INCANTARE signifie définitivement
" soggiogare, rapire per meraviglia , diletto e simili " chez
le gésuite Pietro Sforza Pallavicino (1607-1667).
INCANTEVOLE est attesté pour la première fois en 1857-58 dans
le recueil de poèmes Lucciole d'Ippolito Nievo, utilisé
comme adjectif pour signifier " che incanta, rapisce di piacere, ammirazione
" ; la definition donné en 1887 pour l'adjectif INCANTATORE
est "
affascinante, seducente ", P.PETROCCHI, Novo dizionario universale
della lingua italiana, Milano,1887-1891.
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INCANTATO
sur cet axe de la " séduction" va connaître donc
un développement analogue à celui du français, et donner
à INCANTARE les acceptions suivantes : |
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1.Pour
ce qui est du pouvoir persuasif des paroles :
·ingannato, abbindolato, abbagliato, irretito :
" Da queste e altri simili parole e dolci
abbracciamenti incantato, lo innamorato marito…fu forzato a promettere
ciò che ella desiderava "FIORENZUOLA,
298.
" L'avviso, benché d'altronde
confermato, non venne in quella corte creduto ; la quale pareva dalle proteste
e promessioni de' Francesi incantata ", CAPRIATA, 649.
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2.Pour
ce qui exprime l'idée d'être rempli d'un vif plaisir :
Preso da vivo piacere ; profondamente ammirato, meravigliato, estasiato,
rapito, deliziato :
" Il vostro cuore : orbato, affascinato,
/ incantato, ammaliato, / se a me baderete, : dalla catena discioglierete
", GOLDONI, X- 886.
" Vi giuro che mi parve cosa bellissima,
e perfetta quanto è possibile in tal genere. Io ne sono incantato
", LEOPARDI, III-965.
Che esercita o subisce una suggestione profonda ; pervaso da un'atmosfera
sognante e arcana, meraviglioso, favoloso, idillico :
" Massimo di Tiro…fa di quest'isola
un soggiorno incantato ", CESAROTTI, I-X-289.
" Nella bianca aria traspare / incantato
il paesaggio ", BORGESE, 6-88.
Ineffabile, sublime :
" È trasportato al terzo cielo,
nel mezzo delle immortali beltà, è inebriato di piaceri incantati),
PANANTI, III-167.
Il est évident d'après ces exemples que si dans la langue
parlée, familière, " un soggiorno incantato ", "
un pomeriggio incantato ", " un viso incantevole ", "
una musica che incanta " sont des expressions presque stéreotipées,
mais dès que nous sommes dans la langue littéraire, le sens
de INCANTARE ressourgit dans toute sa plénitude et richesse sémantique.
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III.AXE
DU SAISISSEMENT |
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1)incantare
: distruggere e guarire |
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Sur
cet axe l'italien va opérer des saisies plus nombreuses que le français,
et garder certaines acceptions (mais pas toutes) jusqu'à dans l'usage
actuel, à la difference du français qui, comme nous l'avons
vû, les a perdues. Les deux langues évoluent différemment
dans les deux diréctions possibles vers lesquelles les amème
le sens plein du verbe à ses origines. |
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Il
est intéressant de remarquer que dès le XIV ème siècle,
lorsque le sens d' INCANTARE est pris sur l'axe du "saisissement",
avec donc l'idée de l' arrêt d'un mouvement exprimée
prioritairement, cela peut donner des acceptions apparemment totalement
contraddictoires , telles :
-Rovinare, distruggere ; annichilire ;
-Guarire, sanare ; lenire alleviare ; rendere innocuo ; allontanare,
stornare, scongiurare, mitigare. |
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Cela
peut s'expliquer par les contextes dans les quels INCANTARE est exprimé
:
Si l' idée du " saisissement " (la dépossession
de moyens que l'on opère sur quelqu'un ou quelque chose) vise un
être hostile ou un objet nuisible, INCANTARE aura un sens positif,
comme dans les exemples suivants :
-Guarire, sanare ; lenire alleviare :
" Similmente gli antichi usarono la poesia,
il canto e 'l suono ad incantare i mali e le infermità del corpo,
non altrimenti che quelle dell'animo ",PATRIZI, I-235.
"Nei limiti possibili a un medico, egli c'era
di buon augurio, ci portava fortuna. Incantava i mali con un potere ingenuo,
senz'apparato "CECCHI, 5-221.
-Rendere innocuo :
" Lo XII (capitano) fu Umbro, lo quale
era molto grande incantatore di serpenti ; sapea eziando incantar i loro
morsi " GUIDO DA PISA, I-296 ;
-Cercare di fare passare, di non sentire ; mitigare, (la noia la fame
il tempo etc. …) :
" […] e a ma pare che mandino queste
gente incantando il tempo " M.BOIARDO, 3-307.
Si le " saisissement" atteint des choses de la nature tels des
arbres ( cfr le " charmer des arbres" ), des champs, des récoltes,
on aura là une acception négative :
-Rovinare, distruggere :
" Conta Plinio d'un certo buon uomo fiesolano
agricultore,…accusato d'incantare le raccolte altrui ",SALVINI,
39-V-62-63.
-Annichilire :
" Ora, quello che defrauda del momento della
loro legittima autorità gli Stati ed incanta la forza del Re, e il
Senato ", MAGALOTTI,26- 224. |
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2)incantarsi
: di un essere umano, un'animale, un meccanismo |
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Si
sur cet axe du "saisissement", la première acception de
INCANTARE proche du sens actuel est reperable en 1310-12, chez l'écrivain
et historien florentin Dino Compagni, qui donne au participe passé
INCANTATO la signification de "intontito, trasognato"
( à la même époque chez Boccaccio, en 1341-42 , INCANTATO
continue de signifier "che sembra opera di magia" ), c'est véritablement
au XVIIIème qui a lieu la saisie de "INCANTARSI", intransitif
pronominal, dans le sens de " rimanere attonito ". En 1734
nous repérons INCANTARSI chez le dramaturge et poète Giovan
Battista Fagiuoli dans l'acception de "restare trasognato, estatico"
; la définition donné pour ce verbe en 1887 est " rimanere
immobile, come intontito ", P.PETROCCHI, Novo dizionario universale
della lingua italiana, Milano,1887-1891.
Pour ce qui est des acceptions dans les contextes où le verbe est
referé à des machines, des engins ou des armes, le Vocabolario
milanese-italiano de F. CHERUBINI,, nelle Sopraggiunte de 1856 donne
pour " incantass " figuré: " dicesi del Fermarsi,
o Rallentarsi di un ordigno qualsiasi per qualche difetto "(1856).
La première acception littéraire de INCANTATO pour un objet
qui arrête de fonctionner est attestée au XIX ème siècle,
chez D'Annunzio, qui fait peut-être ici un usage " savant"
d'un italien archaïsant, remis à l'usage dans son sens ancien,
et en cela redécouvert.
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Selon
les contextes, INCANTARSI dans l'italien moderne peut donc prendre des acceptions
que l'on peut nuancer .
-Fissare in un'immobilità trasognata, estatica, astrarsi
profondamente ; immergersi nelle contemlazione di qualcosa :
" S'incanto' per qualche minuto a guardare
il fumo che usciva dal camino della locomotiva ". SVEVO, 5-27.
-Restare come intontito, imbambolarsi :
" Ha fatto cenno alle ragazze che apparecchino
in tavola. " Non v'incantate", ha detto loro."Svelte"
". VITTORINI, 3-49.
-Arrestarsi, fermarsi :
"C'é un muretto coperto d'edera
; lei, la lucertola, s'incanta tra le foglie ".MANZINI, II-X
-Incepparsi, smettere di funzionare (di un meccanismo, di un dispositivo)
:
" Torno' verso il velivolo, udendo i
colpi delle mitragliarice. Il capitano Beltramo la prova…domando :
"S'incanta ancora ? " ", D'ANNUNZIO, VII-771.
Cette acception témoignée pour la première fois par
D'Annunzio nous renvoie au français du XVIIème, dans Le
Dictionnaire Universel d'A. FURETIÈRE :
" On tient que les Sorciers charment
les armes , les empêchent de tirer ; mais il n'est pas trop sûr
de s'y fier " . |
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CONCLUSION |
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Nous
avons constaté que dans enchanté/ incantato,
c'est à dire être séduit et saisi par la persuasion
d'une parole, ou par le charme d'une musique, d'une personne, d'un paysage,
le merveilleux et le surnaturel ne sont jamais complètement absents,
car étroitement liées au mystère de la beauté
(d'un chant ou d'un discours, d'une femme, d'une vue..). Les formes verbales
ENCHANTER et INCANTARE gardent toujours en elles, presque
"génétiquement", cette "magie". La seule
acception dans la quelle le "magique " semble être perdu
est celle de "incantato" rapporté à des mécanismes.
Mais serait-il pousser notre raisonnement trop loin, que d'avancer l'idée
qu'il resterait là une part de mystère, car "il meccanismo
incantato non è rotto" : le mécanisme n'est pas cassé,
mais on ne sais pas pourquoi il ne marche plus ? |
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ACCEPTIONS
FRANCAISES, ITALIENNES, COMMUNES |
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Faire
du charme " chercher à plaire, à séduire
".
Esercitare il proprio fascino.
" À quoi ça sert d'avoir
fait du charme pour eux avec tant de persévérance si tu ne
veux pas les revoir ? M. PROUST, À la recherche du temps perdu,
t. II p. 859.
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Être
sous le charme de… " être impressionné par
… ; être sous l'effet puissant de… ".
Essere impressionato da… ; essere soggiogato da… ".
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Se
porter comme un charme , " très bien, parfaitement
". (Début du XIXème, selon WARTBURG, article Carmen).
" Quelques -uns, suivant l'exemple de
Pierre Larousse, voudraient que cette expression s'applique à l'arbre
appelé charme (comme on dit
: se porter comme un chêne), bien que le charme, arbre des
charmilles, n'ait jamais été un modèle de force et
de puissance. Cette interprétation
doit venir de la bizarrerie "logique" de la locution, appliqué
à charme "influence magique". C'est oublier que charme
désigne aussi "l'illusion"
produite magiquement, et que comme un charme s'emploie depuis le début
du XVIII ème s. avec la valeur adverbiale
de " magiquement, d'une manière quasi illusoire". "
Le Robert, Dictionnaire des proverbes et expressions, Paris 1990.
En italien nous avons : Stare d'incanto .
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Rompre
le charme, " interrompre une situation euphorique, très
agréable ".
Rompere l'incantesimo.
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Charmeur
de serpents,
Incantatore di serpenti
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Vivre
de ses charmes, " se prostituer " (euphémisme).
[…] c'est la rengaine
des sirènes de l'ombre
des pauvres reines de la nuit
à Londres comme ailleurs
ailleurs comme à Paris
Elles vivent de leurs charmes[…]
J.PRÉVERT, Histoires, p. 199-200
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